4.10.23

Portrait de David Grange

Professeur à la HE-Arc ingénierie Membre du groupe de compétences Ingénierie des surfaces Né en 1980 Marié, 3 filles Habite à la Chaux-du-Milieu

Parcours en bref

David est né au Locle. Il quitte la région après son lycée et débute son parcours universitaire par une année en chimie à l’EPFL. Pas vraiment convaincu, il s’assied sur les bancs de sciences politiques à l’Université de Lausanne puis, toujours insatisfait, prend le temps de réfléchir à son avenir professionnel lors d’une année sabbatique. À son retour, il travaille deux ans à l’hôpital psychiatrique de Perreux, dans l’attente de pouvoir commencer la HES en santé-social. Dans un dernier sursaut, il revient vers la science et obtient un Bachelor en Physique à l’Université de Neuchâtel, suivi d’un master à l’EPFL.

De retour dans son canton d’origine, il est assistant pendant cinq ans à la HE-Arc ingénierie puis adjoint, pour finalement décrocher un poste de professeur en 2017. Passionné de musique, il joue dans le groupe Killbody Tuning, qui sortira en automne 2018 son cinquième album. Il apprécie particulièrement le côté intuitif et instinctif de la musique, un bon complément à ses recherches scientifiques. Interview.

Avec quelle technologie travaillez-vous principalement  ?

En préambule, il est peut-être intéressant de rappeler que l’ingénierie des surface, domaine dans lequel je travaille, vise à modifier la surface d’une pièce (montre, implant médical, membrane) en y ajoutant une couche pour en modifier ses propriétés (aspect, coefficient de frottement, résistance à la corrosion,…). Lorsque j’ai débuté comme assistant à la HE-Arc ingénierie, j’ai été chargé de mener un projet subventionné par la HES-SO pour implanter à la HE-Arc une nouvelle technologie appelée  « Atomic Layer Deposition » (ALD).

La spécificité de la technologie ALD consiste à introduire les gaz contenant les éléments chimiques nécessaires à la construction de la couche les uns après les autres dans le réacteur, et non tous en même temps. Les dépôts ont donc lieu couche atomique par couche atomique. Un choix particulier est apporté au choix des gaz précurseurs afin qu’ils répondent à un certain cahier des charges (être sous forme gazeuse, réagir avec la surface, ne pas réagir avec lui-même, etc)

Comment se déroule un dépôt typique au moyen de cette technologie ?

Nous procédons de la manière suivante :

  • Les pièces sont mises dans un réacteur sous vide dans lequel des gaz sont ensuite introduits.
  • Puis de l’énergie sous forme thermique (de 100°C à 500°C, suivant le traitement choisi) est fournie.
  • Grâce à l’apport d’énergie, le gaz réagira avec la surface et créera un nouveau matériau à la surface de l’échantillon, mais juste une monocouche (quelques atomes d’épaisseur).
  • Lorsque la réaction entre le gaz précurseur et le matériau est terminée, celle-ci s’arrête d’elle-même puisque le gaz ne réagit pas avec lui-même.
  • À ce moment, l’excès de gaz est purgé et le second gaz peut être introduit dans le réacteur.

Grâce à ce contrôle des gaz,la qualité des dépôts, déposés couche atomique par couche atomique, est exceptionnelle. Quant à la précision de l’épaisseur déposée, elle est de l’ordre du nanomètre,un millionième de millimètre, soit 50’000 fois plus petit que le diamètre d’un cheveu.

Et concrètement, quelles sont les applications de l’ALD ?

Elles sont nombreuses : protection, décoration, … Une des applications est par exemple esthétique : elle permet de colorer les pièces grâce à un revêtement interférentiel. Sur un échantillon est déposé de l’alumine, de l’oxyde de titane ou tout autre matériau transparent. Selon l’épaisseur de la couche, la couleur obtenue diffère, même si le matériau déposé est transparent. J’illustre régulièrement ce principe avec l’exemple de la tâche d’huile sur une flaque d’eau : on y voit souvent un arc-en-ciel, causé par les différences d’épaisseur de l’huile.

couleurs interférentielles

De manière plus détaillée, quand un rayon de lumière arrive sur une pièce avec un revêtement interférentiel, une partie de cette lumière est renvoyée par la surface du revêtement alors que l’autre partie passe à travers la couche et est réfléchie par la pièce. Du coup, les deux ondes réfléchies sont décalées. Le décalage entre les deux ondes ou la différence de chemin optique, engendre une couleur spécifique, influencée par l’épaisseur du revêtement, car une partie des couleurs contenues dans la lumière du soleil, est éliminée. Par exemple, avec de l’alumine, une centaine de nanomètres déposée permet d’obtenir une couleur bleutée ; avec 200 nanomètres plutôt de l’orangé.

Avec quelles industries collaborez-vous particulièrement ?

L’industrie médicale est très friande de cette technologie qui permet également de protéger les pièces de manière extrêmement fine. La demande est d’ailleurs en croissance depuis plusieurs années, notamment car le canton de Neuchâtel regroupe de plus en plus d’entreprises actives dans le MedTech. Dans l’horlogerie, nous colorons les pièces internes - aiguilles, index, cadrans - grâce aux couleurs interférentielles.

À votre avis, quels sont les atouts de la région et quelles seront les évolutions nécessaires à son maintien sur la scène de l’innovation ?

Les paysages de ce canton et sa qualité de vie sont incroyables. De plus, l’industrie y est hyper performante, à la pointe dans de nombreux domaines tels que le MedTech, l’horlogerie, ou encore la création de start-up hyper innovantes. Le canton n’a vraiment plus rien à prouver à propos de ses capacités d’innovation. Par contre, il doit faire attention à rester  attractif pour les chercheurs et les entrepreneurs. Il a d’ailleurs à cet égard de gros défis en termes financiers. C’est parfois difficile à comprendre : être si riche industriellement et si pauvre financièrement.
De plus, nous devons encore travailler sur la cohésion cantonale et admettre que d’un point de vue extérieur, ces dissensions sont complètement incompréhensibles. La HE-Arc est une institution qui favorise à mon avis cette unité, avec plusieurs sites sur lesquels les professeurs se déplacent. Cela permet des échanges intra-cantonaux, voir inter-cantonaux, dans un espace commun.

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